Lu dans Le Monde - Entrée à l'université : le curieux service après-vente de deux députés LRM dans un lycée

Alors que l'Assemblée a adopté mardi en première lecture la loi réformant l'accès à la fac, des parlementaires sont venus la présenter à des parents dans la soirée. Accueil inquiet.

Camille Stromboni

Le Monde Campus, 20/12/2017

http://www.lemonde.fr/campus/article/2017/12/20/entree-a-l-universite-le-curieux-service-apres-vente-de-deux-deputes-lrm-dans-un-lycee_5232465_4401467.html

Entrée à l'université : le curieux service après-vente de deux députés LRM dans un lycée

Alors que l'Assemblée a adopté mardi en première lecture la loi réformant l'accès à la fac, des parlementaires sont venus la présenter à des parents dans la soirée. Accueil inquiet. Camille Stromboni

Ils ne sont pas arrivés en terrain conquis, loin de là. « Admettez que c'est une nouvelle sélection, pourquoi vous ne l'assumez pas ? », lance sans détour un parent d'élève. Venus présenter la réforme de l'accès à l'université devant des parents d'élèves de terminale, Laetitia Avia et Pierre Person, jeunes députés parisiens La République en marche (LRM), ont été fraîchement accueillis mardi 19 décembre, alors qu'ils tentaient un curieux service après-vente d'un texte adopté le jour-même, à l'Assemblée nationale, en première lecture.

Inquiets, perdus, en colère, la soixantaine de parents et les quelques lycéens installés dans la salle de cinéma du lycée Maurice Ravel (Paris, 20e) ne manquaient pas de questions, très concrètes, alors qu'arrivent pêle-mêle des « attendus » à l'entrée des licences et des recommandations des premiers conseils de classe de terminale sur l'orientation des élèves, dans un « grand flou »quant au rôle de ces futurs ingrédients dans le passage à l'université.

« S'il y a trois candidats qui ont les mêmes prérequis pour une seule place à l'université, que se passera-t-il ? », « Je ne comprends pas comment le dernier mot va revenir au bachelier », « On sera obligé de faire dix voeux ? » « Les universités tiendront compte de l'avis du conseil de classe ? », « L'université ne pourra pas dire non, c'est bien ça ? ». Les questions s'enchaînent, avec en filigrane la peur de voir leurs enfants constituer une génération « crash-test ».

Embarrassés

En face, les députés ont eu bien du mal à éclaircir les zones d'ombre. Leur long préambule sur les maux du système actuel auxquels la réforme va mettre fin - cet « injuste tirage au sort » , ce « système APB (Admission postbac) à bout de souffle » , ce « taux d'échec en licence trop élevé » ... - n'a pas suffi à convaincre. « Je veux bien évoquer l'origine et la philosophie de la loi, mais le calendrier ou les éléments techniques, je ne peux pas » , a reconnu, penaud, Pierre Person. Tout en tentant d'avancer certains principes, pour le moins étonnants. « Un candidat aura forcément deux réponses positives de l'université, qui pourront être un oui ou un oui mais " », a-t-il ainsi promis, ne manquant pas d'être franchement questionné par des parents ayant bien en tête ces filières en tension qui n'ont pu accueillir tous les candidats, déjà à l'été 2017.

« Est-ce qu'on est plus rassuré après cette discussion, je ne pense pas, et on n'est pas plus informé non plus... » , regrette une maman d'élève, qui salue tout de même l'initiative « Je trouve ça scandaleux que des députés viennent nous vendre leur soupe dans un lycée public » , lâche à l'inverse une mère d'élève excédée, entre deux portes.

Du côté des parlementaires, l'organisation du rendez-vous embarrasse. Si la députée Laetitia Avia assure qu'elle est venue faire ce qu'elle considère comme un « exercice de pédagogie » à la demande des parents d'élèves, le proviseur du lycée, Philippe Le Guillou, confie à l'inverse que c'est à sa propre demande que la parlementaire est venue rencontrer les parents de sa circonscription...

Camille Stromboni