Sélection à l'université : la mobilisation cherche à se renforcer

Étudiants, personnels, enseignants et directeurs de formation dans une même réunion, ce mercredi 14 mars, sur le campus Tertre, à Nantes. Plutôt rare. Ça bouillonne et ça discute ferme autour des nouvelles modalités d’entrée à l’université.

Ouest-France (site web) / Régions/Pays de la Loire/Loire-Atlantique/Nantes, mercredi 14 mars 2018 - 1024 mots

par Yasmine TIGOÉ.

Étudiants, personnels, enseignants et directeurs de formation dans une même réunion, ce mercredi 14 mars, sur le campus Tertre, à Nantes. Plutôt rare. Ça bouillonne et ça discute ferme autour des nouvelles modalités d’entrée à luniversité.

Des points communs

Ce n’était pas gagné. D’un côté, sur le parvis du Nouveau Tertre, une assemblée générale d’étudiants. De l’autre, dans un amphi de la fac de Droit, un «  espace de paroles  » sur la réforme en cours, à l’initiative des directeurs de plusieurs filières. Ce temps d’échanges est d’abord boudé par les étudiants de l’assemblée générale. Qui, finalement, rejoignent la discussion.

Pas si fréquent que se retrouvent dans une même réunion, étudiants, enseignants-chercheurs, personnels administratifs, directeurs de composantes… Plus de 500 personnes, au plus fort de la réunion, pour discuter Parcoursup, moyens de mobilisation, banalisation des cours les jours de grève… Dialogues de sourds, par moments. Agacements des uns et des autres et méfiance parfois. Même si, sur le fond, les avis ne semblent pas si divergents. «  Ne faut-il pas trouver quelque chose de commun à tout le monde et à partir de cela, construire quelque chose de concret, pour que cette réunion ne nous mène pas à rien  »,lance un étudiant.

Un point commun ? La grosse majorité des personnes présentes ne veulent pas d’une sélection à luniversité. Reste la forme. Et , pas si simple d’être d’accord.

Des filières prennent position

Que veulent les étudiants qui ont voté le blocus ? Ils ont plusieurs revendications. «  La récupération des objets personnels et de première nécessité restés au château du Tertre et au rez-de-chaussée de Censive ; l’arrêt des interventions policières sur les différents campus universitaires ; une banalisation des cours lors des journées de mobilisation ; une prise de position claire et la communication de chaque UFR concernant le plan Vidal.  » Si pour les deux premières revendications, il n’y a rien d’acté, les deux autres semblent acquises.

Ainsi en histoire, a été votée une motion «  pour que tous les lycéens accèdent à l’enseignement supérieur  ». Cinq des six départements de l’UFR de lettres ont également annoncé qu’ils ne procéderaient pas à une sélection des futurs étudiants. «  On s’interroge pour mieux accueillir, mais sans les principes de la sélectionsouligne le doyen.  D’ailleurs, cette loi parle de réussite des étudiants. Il faudrait plutôt parler d’évanouissement.  » Applaudissements… Le directeur d’Igarun (fac de géo) aindiqué aussi que son équipe refusait d’appliquer cette loi. «  Une majorité d’entre nous trouve qu’elle est trop précipitée et que l’on n’a pas les moyens de mettre en place un véritable accompagnement.  » Refus également en Socio.

Des doutes et des réserves

D’autres composantes n’ont pas pris ce parti. Même s’ils ont des réserves sur les nouvelles modalités d’accès à luniversité et regrettent le calendrier très court. «  On est attaché à la démocratisation de l’enseignement supérieur, rappelle la doyenne de Droit.  Mais nous avons 4 000 candidats pour la rentrée. Comment faire ? Il y a nécessité d’accueillir les candidatures. Mais on ne peut pas pousser les murs et multiplier le nombre d’administratifs et d’enseignants-chercheurs.  »

Elle avoue être dubitative : «  J’attends les moyens  ». «  Chez nous, les avis divergent, résume le directeur de FLCE (Faculté des langues et cultures étrangères).  Depuis des années, on dit : pas de limitation de capacité d’accueil, pas de sectarisation.  » Pas de prise de position contre l’étude des dossiers des candidats «  mais mes convictions et les vôtres sont les mêmes  ».  Un dispositif d’accompagnement va être mis en place pour les étudiants fragiles. Parmi les directeurs présents, il y a aussi des pas concernés. Comme celui de la fac de chirurgie dentaire, a priori pas contre la loi. «  Mais je ne sais pas où j’en suis, avoue-t-il.  Je suis venu pour m’informer.  »

Blocus ou pas

Les visions, somme toute, sont assez semblables. Le point qui coince : le blocus. «  Il nous pose problème car il ne nous permet pas de préparer administrativement la fin du semestre, les contrôles continus et examens…, explique un directeur d’UFR. On souhaiterait que les personnels administratifs, techniques, et enseignants-chercheurs puissent accéder aux locaux pour conduire ces actes administratifs.  » «  Dans les faits, il n’y a eu que cinq blocages en trois mois, rappelle un étudiant.Ce n’est pas énorme.  » Mais ça ne plaît pas à tout le monde. Un groupe «  pour réunir tous ceux qui en ont marre de ne pas pouvoir suivre les cours correctement  » vient de se constituer sur Facebook.

Sont bloqués, ce mercredi 14 mars, les entrées des bâtiments Tertre, Censive, Socio, FLCE et Igarun (UFR de géographie). Même scénario ce jeudi 15 mars, jour de manifestation. Les étudiants mobilisés demandent «  une charte de protection des étudiants grévistes  » . Flou, pour l’instant.

Des moyens pour luniversité

Que ressort-il de ces trois heures de discussion ? Que tous veulent des moyens pour luniversité, nerf de la guerre. Et, à plus court terme, un espace pour échanger. «  Mais pour écouter toutes les voix, insiste un représentant de l’asso étudiante InterAsso.Vous n’avez pas une voix qui compte plus que celle des autres étudiants. J’espère que vous prendrez le temps de discuter avec tout le monde. Même ceux qui ne sont pas d’accord avec vous.  »

Les directeurs d’UFR ont proposé la création d’une commission réunissant des personnes de différents statuts. Les étudiants sont invités à y participer .  Objectif ? «  Voir ce qu’on peut mettre en place par rapport à la réforme.  » OK, mais attention à laparlotte, alerte un maître de conférences : «  Il faut surtout voir comment faire pour ne pas que la réforme s’applique et ne pas se laisser endormir par des espaces de discussions.  »